Ali Boulahfa aura finalement quitté le palais de justice de Lille les poches alourdies par quinze ans de détention. Hier, ce prévenu de 24 ans et son avocat s'étaient pourtant entêtés à étriller le dossier et à hurler à l'innocence. Pour de très graves blessures par balle sur un policier le 17 octobre 2003 à Roubaix, et en attendant d'autres dossiers pour braquage, Boulahfa entame une longue nuit en prison.
D'un côté, il y a Emmanuel Riglaire. Représentant les hommes visés par des rafales de kalachnikov il y a cinq ans, l'avocat rappelle les immenses douleurs, les profondes blessures de la principale victime et lance : « J'ai l'honneur de défendre de grands policiers.
» De l'autre, il y a Ali Boulahfa et son avocat, Farid Maachi. Aucun des deux ne peut prendre le risque d'ignorer le martyre d'un membre de la BAC ayant frôlé la mort et pour qui des années seront nécessaires pour se reconstruire. En même temps, le magma bouillonnant en Boulahfa est perceptible. Le prévenu se retient d'hurler pour marteler sa position. Encore et encore.
« Ce jour-là, je n'ai pas tiré, assène un homme encadré par des colosses du Groupe d'intervention de la police nationale. Je n'étais pas dans la voiture d'où les rafales sont parties ! Je ne préparais pas de braquage ! Je n'étais pas là ! Pas là ! » La police soupçonne Boulahfa et deux hommes déjà condamnés en 2006 de s'être, ce soir-là, embusqués pour attaquer des convoyeurs alimentant un distributeur automatique de billets. La confrontation, à la barre, avec Hervé Vlamynck, « patron » de la brigade de répression du banditisme et de la brigade de recherche et d'intervention, à la PJ de Lille, au moment de l'enquête, transforme la salle d'audience en arène. « Au début de nos investigations, Boulahfa est, pour nous, un personnage secondaire, rappelle l'enquêteur. Paradoxalement, les éléments importants le concernant apparaissent après sa fuite. » Notamment une série de dépositions sous X.
« Vite au braquage »
Boulahfa et son avocat s'acharnent à démolir ces « témoignages indirects » et interpellent Vlamynck. « Je ne peux pas jouer le rôle d'Ali Boulahfa », rétorque le policier. Pour justifier un réquisitoire sévère - quinze ans de prison -, le procureur Bedos cite un responsable de l'Office central de répression du banditisme : « Vous avez dans votre région un banditisme de quartier en augmentation. De jeunes garçons qui montent très vite au braquage. » Quelques heures plus tard, le tribunal présidé par Jacques Huard rendra sa décision : quinze ans.
source : La Voix du Nord (08 novembre 2008)
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